Cette composition s’intitule « Celui qui pendant des années erra », achevée fin octobre 2020. Elle présente une synthèse illustrée du périple d’Ulysse, réalisée à partir de la relecture de cette grande épopée homérique, et donc basée sur des relevés de citations de l’Odyssée.

J’ai pris beaucoup de plaisir à redécouvrir ce texte et à le mettre en image. C’est un récit formidable, malgré quelques longueurs, il faut le reconnaître…. Un texte qui – j’aime à croire – résonne encore aujourd’hui, comme il pouvait résonner dans les chants des aèdes de l’époque. J’ai souhaité le retranscrire et lui rendre hommage à ma manière, à travers cette « Compozia ».

Voici donc 40 citations de l’Odyssée qui ont inspirée mon illustration. Je me suis inspirée de beaucoup d’autres mais voici les 40 principales, les plus évocatrices. Il s’agit de la traduction de Frédéric Mugler, aux éditions Babel-Actes Sud (1995), bien que le titre que j’ai donné à mon œuvre soit une référence aux premiers vers traduis par Philippe Jaccottet.

 Il s’agit d’un mapping interactif, il vous suffit de circuler la souris sur l’image pour faire apparaître les citations

Chant I : « Lors Athéna, la déesse aux yeux pers, lui répondit : « […] mais moi, si j’ai le cœur brisé, c’est pour le sage Ulysse […] » « […] puis elle prit sa forte lance à la pointe acérée, sa longue et lourde lance qui abat dans chaque rang bien des héros, quand cette fille du Dieu Fort se fâche. » Chant I : « C’est Poséidon l’Ebranleur du sol, qui le poursuit de son courroux, pour avoir crevé l’œil de Polyphème, […] à compter de ce jour, Poséidon, Soutien de la terre, sans mettre Ulysse à mort, le fait errer loin de chez lui. » « Zeus, l’assembleur des nuages » / « le Porte-Egide » / « le grand Tonneur, à la force invincible » / « l’époux retentissant d’Héra » / « le grand manieur de foudre » Chant VIII : « L’Aède, après quelques accords, commença un beau chant sur les amours d’Arès et d’Aphrodite couronnée. Ils s’unirent d’abord secrètement chez Héphaestos. […] Dès qu’Héphaestos eut entendu ce récit douloureux, il courut dans sa forge en ruminant de noirs desseins, il mit sur le billot sa grande enclume et y forgea d’épais et solides liens pour prendre les amants. » Refrain : « Lorsque au petit matin parut l’aurore aux doigts de rose » Chant I : « Les autres dieux siégeaient auprès de Zeus Olympien. » Chant VIII : « Dis-nous l’histoire du cheval, qu’Epéios, aidé d’Athéna, construisit tout en bois et que par ruse Ulysse introduisit dans l’acropole, plein de guerriers qui s’apprêtaient à piller Ilion. » […] « Leur destin était de périr, du jour que dans leurs murs ils rentreraient ce grand cheval de bois, où se cachait l’élite des Argiens prêts à semer mort et carnage. » Chant IX : « D’Ilion le vent m’entraîna jusque chez les Cicones. Je pillai Ismaros, dont je tuai les défenseurs ; on prit dans leur cité tous les trésors […]. De tous les côtés volaient les javelots de bronze. […] Les Cicones vainqueurs mirent nos guerriers en déroute. » Chant IX : « Le dixième [jour], enfin, on toucha le pays des mangeurs de fleurs, appelés Lotophages. […] Ceux-ci, bien loin de méditer la perte de nos gens, leur firent manger du lotos au cours de leur repas. Or quiconque en goûtait le fruit aussi doux que le miel ne voulait plus rentrer chez lui ni donner de nouvelles, mais ne rêvait que de rester parmi les Lotophages, à se repaître de lotos, dans l’oubli du retour. » Chant IX : <i>épisode du Cyclope Polyphème</i> : « mes gens se tenaient près de moi ; le ciel décuplait notre audace. Soulevant le pieu d’olivier à la pointe acérée, ils l’enfoncèrent dans son œil » Chant X : « [Eole] écorcha un taureau de neuf ans et, dans la peau, emprisonna les vents hurleurs qui sifflent de partout ; car le fils de Cronos l’avait fait gardien des vents, qu’il pouvait déchaîner ou apaiser selon son gré. […] [Mes compagnons] délièrent l’outre, et tous les vents s’en échappèrent, aussitôt l’ouragan saisit mon équipage en pleurs […] ». Chant X : « Toute à ses noirs desseins, elle prépara le breuvage dans une coupe d’or et, y ayant versé sa drogue, me fit boire le tout, sans que la magie opérât ; puis me frappant de sa baguette, elle me dit ses mots : « va coucher dans l’étable à porcs avec tes compagnons ! » Alors, tirant mon glaive aigu qui pendait à ma cuisse, je sautai sur Circé, en faisant mine de l’occire. » Chant X : « Hermès à la baguette d’or vint au-devant de moi […] et me dit : « Où vas-tu malheureux, tout seul, à travers ces collines, sans connaître les lieux ? […] Cependant je vais te tirer d’affaire et te sauver. Si tu veux entrer chez Circé, prends cette herbe de vie ; son effet bienfaisant t’évitera le jour fatal. » Chant X : « On vit venir de tous les côtés les vaillants Lestrygons ; ils accoururent par milliers, moins hommes que géants, et jetèrent d’en haut sur nous d’énormes blocs de pierres. Aussitôt de nos nefs monta un terrible tumulte d’équipages mourants et de navires fracassés. Des corps pris au harpon, ils firent un affreux festin » Chant XI : « Je tirai le glaive pendu à ma cuisse et creusai un carré ayant une coudée ou presque ; tout autour, je versai aux morts les trois libations, […]. J’invoquais longuement les morts, […] je saisis les deux bêtes, puis je leur tranchai la gorge sur le trou ; le sang noir coula […]. Alors apparut l’ombre du Thébain Tirésias, tenant son sceptre d’or. […] Alors il vint boire au sang noir. » Chant XI : « Je voulus embrasser l’ombre de ma défunte mère. Trois fois je m’élançai ; mon cœur me pressait de l’étreindre ; mais trois fois, telle une ombre ou un songe, elle s’échappa de mes mains, ne rendant que plus poignante ma douleur. » Chant XI : « Alors je vis venir l’ombre de Péléide Achille, puis celles de Patrocle, d’Antiloque sans défaut et d’Ajax, qui, après le fils éminent de Pélée, fut le plus beau et le plus grand des Danaens. L’ombre de l’Eacide aux pieds légers me reconnut » […] « J’aperçus aussi Héraclès, ou son ombre plutôt, car le héros lui-même a son séjour parmi les dieux ; […] Il tenait son arc nu et une flèche sur la corde, l’œil menaçant, comme un archer toujours prêt à tirer […]. Héraclès, du premier regard, reconnut qui j’étais » Chant XII : « Notre vaisseau bien fait atteignit l’île des Sirènes. […] à chacun de mes compagnons je bouchais les oreilles. Dans le navire, alors ils me lièrent bras et jambes, debout sur l’emplanture, et le corps enchaîné au mât ; puis la rame frappa le flot qui blanchit sous les coups. Notre vaisseau rapide n’était plus qu’à la distance où porter un cri, quand les sirènes l’aperçurent tout près de là. Leur voix suave alors se fit entendre » Chant XII : « C’est là que demeure Scylla, l’effrayante aboyeuse […] enfoncée à mi-corps dans les profondeurs de la grotte, elle darde ses [six] cous hors de cet antre redoutable, et de là elle pêche explorant l’écueil tout entier, […] avec chacune de ses têtes elle arrache une proie au navire à la sombre proue. » […] « L’autre écueil […] porte un grand figuier sauvage à l’ample floraison ; en bas la divine Charybde engloutit l’onde noire ; trois fois par jour elle vomit, trois fois elle engloutit avec fureur. » Chant XII : « Lors, pourchassant les vaches les plus belles du Soleil, (elles paissaient tout à côté de la proue azurée, ces belles vaches au grand front, aux cornes recourbées). Ils les cernèrent, puis s’en furent invoquer les dieux […]. La prière achevée, on égorgea, on dépeça. […] Le céleste Soleil […], rempli de courroux, disait aux Immortels : « O Zeus Père, et vous autres dieux, éternels Bienheureux, châtiez les hommes d’Ulysse, le fils de Laërte […] » […] Zeus se mit à tonner et foudroya notre vaisseau […] ». Chant V : « [Ulysse] pleurait sur le promontoire où il passait ses jours, le cœur brisé de larmes, de soupirs et de tristesse, et promenant ses yeux mouillés sur la mer inféconde » […] « Debout à ses côtés la nymphe divine lui dit : « Pauvre ami ! n’use plus tes jours à pleurer de la sorte. Me voici toute prête à te laisser partir d’ici. » Chant II : « Elle avait dressé dans le palais un grand métier pour y tisser un immense linon et nous disait : « mes jeunes prétendants, le divin Ulysse est bien mort. Mais quoique cet hymen vous presse, attendez que j’achève, car je ne voudrais pas que ce fil ne serve à rien ; ce sera pour ensevelir notre seigneur Laërte […]. » Ces mots calmèrent aussitôt la fougue de nos cœurs. Dès lors, pendant le jour, elle tissait sa grande toile, mais la défaisait chaque nuit, à la lueur des torches. » Chant XVI (et chant I) : « Pénélope, ayant regagné son étage brillant, pleurait encore Ulysse, son époux, quand Athéna s’en vint rependre sur ses yeux la douceur du sommeil. » <i>Athéna se métamorphose souvent dans l'Odyssée, sous les traits d'humains ou d'animaux. J'ai choisi ici de la représenter sous l'apparence d'une chouette effraie<i/> Chant VI : « Le divin Ulysse émergea des broussailles. Sa forte main avait cassé, dans l’épaisseur du bois, un rameau bien feuillu pour cacher sa virilité. […] En voyant l’horreur de son corps abîmé par la mer, [les servantes] s’enfuirent en tous sens jusqu’au bord du rivage, excepté [Nausicaa] la fille d’Alkinoos, car Athéna lui donnait du courage et chassait la peur de ses membres. » Chant V : « Poséidon, l’Ebranleur du sol, souleva contre lui une horrible montagne d’eau qui lui croula dessus. Comme un vent violent balaie un tas de paille sèche et la disperse en l’emportant aux quatre coins de l’aire : ainsi fusèrent les poutres de bois. Ulysse alors monta sur l’une et l’enfourcha comme un cheval de course ». <b>→</b> <i>Remarque : j’ai choisi une position différente qui selon moi évoquait davantage le naufrage, la noyade.</i> Chant IV : « Cette île est le séjour du Vieillard de la mer, Protée, ce dieu prophète égyptien, qui de la mer entière connaît les profondeurs ; il a pour maître Poséidon, […] A ses côtés, les phoques nés de la Fille des mers viennent dormir en troupe, émergeant de l’écume grise. […] Il s’étendra près d’eux comme un berger dans son troupeau. » Chant XIII : « Pallas alors chassa la nue, et la terre apparut. Tout à la joie et au bonheur de revoir son pays, le divin Ulysse en baisa la glèbe nourricière. » Chant XVI : « Je suis ton père, celui pour lequel tu te désoles et souffres tant de maux, en essuyant les coups d’autrui. » Sur ce, il embrassa son fils et, le long de ses joues, laissa couler les pleurs jusqu’alors toujours refoulés. Chant XIX : « La vieille femme, alors, prit un chaudron resplendissant qui servait pour les bains de pieds […]. Quant à Ulysse, il se mit loin du feu et lui tourna vite le dos, car il avait soudain pensé qu’en lui touchant le pied, elle verrait sa cicatrice et tout se saurait. Elle s’en vint laver son maître et reconnut soudain la marque faite un jour par les crocs blancs d’un sanglier. » Chant XXI : « Ulysse l’avisé continuait de tâter son grand arc et de tout voir. Tel un homme connaissant bien la cithare et le chant […] de même Ulysse tendit le grand arc sans nul effort ; […] il prit le trait pointu […] le posant sur le manche, il tira la corde et l’encoche, et, sans même quitter son siège, il visa droit au but. La flèche à la pointe d’airain, passant de hache en hache, s’engagea par un trou et ressortit à l’autre bout sans en manquer aucune. » Chant XXII : « C’est ainsi que dans la grand-salle, assaillis de partout, tombaient les prétendants ; un bruit horrible s’élevait des crânes fracassés, et le sol ruisselait de sang. […] Ulysse lui fouillait des yeux tous les coins de la salle, pour dénicher quiconque eût voulu fuir la sombre mort. Mais il les vit bien tous, allongés les uns sur les autres dans la boue et le sang ; […] ainsi gisaient les prétendants ne formant qu’un seul tas. » Chant XXIII : « Alors le désir de pleurer le reprit de plus belle, tandis qu’il étreignait sa tendre et fidèle compagne. […] De même elle eut beaucoup de joie de revoir son époux, et de son cou ne pouvait plus détacher ses bras blancs. » Chant XXIV : « Tandis qu’Ulysse gagnait le verger plein de fruits pour éprouver son père. […] quand le divin et endurant Ulysse l’aperçut accablé par les ans et le cœur brisé de chagrin, il s’abrita sous un poirier et se mit à pleurer. […] un noir nuage de douleur enveloppa Laërte, et, prenant à deux mains une poussière toute sombre, il s’en couvrit ses cheveux blancs et sanglota sans fin. Ulysse fut bouleversé de voir son père ainsi, et un âpre picotement irrita ses narines. Il l’élança pour l’embrasser ». Chant XV : « Je t’offrirai ce cratère ouvragé, tout en argent, réhaussé sur les bords, d’une lisière de vermeil. C’est l’œuvre d’Héphaestos ; il me vient du roi Sidon […] » Chant XV : « Hélène était devant ses coffres remplis des voiles fins qu’elle avait brodés de ses mains. Hélène, alors, femme divine, en retira le voile le plus grand et le plus finement brodé ; il était placé tout au fond et brillait comme un astre. » Chant III : <i>Scène de sacrifice</i> : « C’est Nestor, le vieux meneur de chars qui donna l’or. L’homme le travailla, puis en couvrit les cornes de la bête, afin de plaire à la déesse. […] le vieux Nestor répandit l’eau et les grains d’orge en priant Athéna, puis jeta sur le feu des poils prélevés sur la tête. » <i>(Le cou de la bête sera ensuite tranché, puis la viande dépecée et cuite … )</i> Chant XI : <i>Le fantôme d’Agamemnon raconte à Ulysse</i> : « c’est Egisthe qui a combiné un coup fatal, aidé par ma maudite épouse ; il m’a tué chez lui, en plein festin […]. Tout autour du cratère et des tables pleines de mets, nous jonchions la grand-salle, et le sol ruisselait de sang ; et pour comble d’horreur j’entendis les cris de Cassandre, la fille de Priam, que la perfide Clytemnestre égorgeait sur mon corps. » Chant XVII : « Ils […] descendirent se baigner dans les cuves polies. Des femmes les lavèrent, les frottèrent d’huile fine […] » Chant I : <i>Les premiers vers de l’Odyssée en caractères grecs</i> : « Muse, dis-moi l’homme inventif, qui erra si longtemps, lorsqu’il eut renversé les murs de la sainte Ilion, […] » Chant I : « Ma mère, pourquoi refuser à ce fidèle aède de nous charmer comme il l’entend ? Qu’y peuvent les aèdes ? C’est Zeus qui, pouvant tout, nous donne, à nous, pauvres humains, le lot qu’il veut bien nous laisser à chacun en partage. Laisse-le donc chanter le triste sort des Danaens. Le chant que les mortels admirent le plus volontiers est toujours le dernier qui vient caresser leurs oreilles. Que ton âme et ton cœur aient donc la force de l’entendre. »

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